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Première traversée solitaire ''à l'envers'' du massif du Fitz Roy

Le Belge Seán Villanueva O'Driscoll a récemment réalisé la première traversée solitaire du massif du Fitz Roy, ce dans le sens opposé à celui de la première traversée du massif réalisée en 2014 par les Américains Tommy Caldwell & Alex Honnold (qui s'était alors faite dans le sens nord-sud).

Le compte-rendu de Rolando Garibotti, extrait de sa page « Patagonia Vertical ». Pour le nom des voies et des sommets, se reporter à son site : « Pataclimb » mis en lien de l'actu.

« THE MOONWALK TRAVERSE « 

Entre le 5 et le 10 février, Seán Villanueva O'Driscoll a réalisé la première ascension solitaire en sens contraire de la traversée des sommets du Fitz Roy, une traversée qu'il a baptisée «The Moonwalk Traverse». La réalité semble avoir toujours cette capacité de dépasser l'imagination. C'est ainsi que l'inimaginable s'est produit.

Seán a approché la chaîne du Fitz Roy par le sud-est, par la Laguna Sucia, dormant dans la grotte située près du bord du glacier.

Le 5, il a commencé à grimper, portant un petit sac de hissage et un sac avec dix jours de nourriture, une petite tente, un sac de couchage léger, et bien sûr, sa flûte irlandaise. Il utiliserait une corde simple de 60m pour s'assurer et une corde mince de hissage. Les prévisions tablaient sur six jours et demi de beau temps. Au final il s'est auto-assuré sur toutes les longueurs hormis les plus faciles, et a tout grimpé en libre (4000m/6c/50 degrés).

Ce jour-là, il a commencé par grimper l'Aguja De l'S par la voie de la « Cara Este », enchaînant avec la voie « Austríaca » à l'Aguja Saint-Exupéry. Dans cette dernière, des chutes de pierres ont entaillé en trois points l'âme de sa corde de 60m. Un coup dévastateur aussi tôt dans une si longue traversée, mais après avoir constaté les dégâts, il a décidé de continuer. Son premier bivouac se fit sur la crête menant à l'Aguja Rafael Juárez.

Le deuxième jour, alors qu'il se dirigeait vers l'aiguille précitée, une boucle de harnais s'est cassée et il a alors perdu quelques Camalots. Avec une corde endommagée et moins de Camalots, sa situation ne semblait guère reluisante mais la curiosité le poussa malgré tout. Il gravit la partie supérieure de l '« Anglo-Americana », puis descendit la « Piola-Anker » pour atteindre la base de la face sud de l'Aguja Poincenot. Il est alors monté par la voie « Fonrouge-Rosasco », bivouaquant à proximité de la jonction avec la « Whillans-Cochrane ».

Le troisième jour, qui était le jour de son 40ème anniversaire, le Belge est monté au sommet de la Poincenot, puis a entamé une descente en rappel vers le nord par la voie « Invisible Line ». Du col, il a alors gravi l'Aguja Kakito, ouvrant quelques longueurs nouvelles pour atteindre le sommet par l'est. Il est alors descendu et a traversé jusqu'à La Brecha, arrivant peu après midi. Bien qu'il fût tôt, il décida de prendre le reste de la journée pour se reposer.

Au quatrième jour, le 8, il affrontait le Cerro Fitz Roy, gravissant la combinaison « franco-argentine ». Les moments les plus délicats de toute la traversée survinrent après la «fin des difficultés», négociant les passages en glace sous le sommet en chaussures d'approche avec des crampons en aluminium. Descendant ensuite vers le nord par la voie « Casarotto », des vents violents et une cascade le stoppèrent tôt à nouveau, deux longueurs au-dessus du pilier Goretta. Sa corde était en mauvais état et la mouiller ne semblait pas une idée sage.

Le matin du 9, il est descendu en rappel au « Bloque Empotrado », a gravi l'Aguja Val Biois puis fait la longue traversée vers l'Aguja Mermoz. Ce dernier tronçon s'est avéré plus dur et plus long qu'il ne l'avait prévu, mais il a tout de même réussi à atteindre le sommet de l'Aguja Mermoz pour y bivouaquer.

Lors de son sixième jour d'ascension, le 10, il a rappelé la partie haute de la voie « Argentine », puis gravi la voie «Lüthi-Dominguez» jusqu'au sommet sud de l'Aguja Guillaumet pour ensuite traverser jusqu'au sommet principal. Là il n'était pas certain de savoir quel itinéraire choisir pour descendre, mais en voyant une chute de pierres pilonner la voie « Amy », il opta pour la voie « Brenner-Moschioni », atteignant le Paso Guillaumet vers 14 ou 15 heures. Dans le dernier rappel, l'une des entailles de sa corde a finalement cédé, exposant l'âme sur plusieurs mètres. Une corde salement endommagée le premier jour avait miraculeusement survécu jusqu'au bout.

Marchant vers Piedra del Fraile, mais voulant s'imprégner encore un peu de l'expérience qu'il venait juste de vivre, il décida de s'arrêter à Piedra Blanca. Un grand voyage de cette ampleur méritait une pause avant de revenir à la civilisation.

Seán semble être la seule personne qui n'ait pas encore saisi l'ampleur de ce qu'il a accompli, ascension que Colin Haley a décrite comme peut-être la plus exigeante jamais réalisée en solo dans la région. Par-delà ses compétences en escalade et ses capacités physiques bien connues, ce qui est clair, c'est que l'arme secrète de Seán a été son attitude mentale, sa volonté de toujours faire un pas de plus et de le faire avec une curiosité ouverte. Il a joué de la flûte sur chaque sommet et a médité près de 15 minutes chaque matin. Une ascension aussi longue et difficile nécessite une maîtrise physique évidente, mais surtout la capacité de savoir faire une pause.


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Actu proposée par Rodolphe POPIER

Mise en ligne le mercredi 17 février 2021 à 11:33:40

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