Les Dossiers du G.H.M.

Sauvetage d'Élisabeth Revol - La résolution heureuse de la polémique dont s'est emparée la presse française.

 

Lieu: Chamonix, France

Date: 2018-04-26

Confidentiel: Non


Objet :

À son retour en France, les médias se sont précipités sur Élisabeth Revol. Son drame avait été suivi heure par heure sur les réseaux sociaux.

Cette polémique s'est déclenchée une semaine après son retour en France, lors d'une conférence organisée le 7 février à Chamonix par Anne Géry d'Infocîmes qui avait pris en charge la communication avec la presse d'Élisabeth Revol.

Élisabeth Revol a alors exprimé sa colère contre la lenteur des secours Pakistanais, son routeur Ludovic Giambiasi rajoutant ses propres critiques en évoquant des informations erronnées sur les capacités des hélicoptères de l'armée pakistanaise et une surenchère sur les prix. Ces critiques étaient injustifiées, mais malheureusement elles ont fait la une des journaux, avec des titres comme « L'alpiniste Élisabeth Revol en colère contre la lenteur des secours pakistanais », « Le chantage financier des Pakistanais », « Les secours pakistanais ont-ils trainé des pieds ?», « La colère froide des Pakistanais après les accusations d'Élisabeth Revol. »

Comme Élisabeth l'écrit dans sa lettre du 13 mars aux autorités pakistanaises, aux 4 pilotes qui ont assuré son sauvetage, à Askari Aviation, au club alpin pakistanais et à l'ambassadeur du Pakistan en France, elle était « au fond d'un abîme émotionnel », profondément meurtrie par le décès de son compagnon de cordée, encore persuadée qu'il aurait pu être sauvé. Dans sa lettre, Élisabeth les remercie tous et s'excuse des critiques qu'elle a exprimé lors de cette conférence. Moin Ul Haque, l'ambassadeur du Pakistan à Paris, avait le 27 février dernier déclaré très diplomatiquement au journal Le Point : « Plusieurs points nous ont heurtés, notamment des commentaires dans les médias, exprimant leur colère face à la lenteur de l'opération de sauvetage, l'exigence de « money cash », « on the table » Impressionné par la bravoure de la Française, le diplomate avait ajouté : « Malgré les critiques, elle sera toujours la bienvenue. C'est une célébrité au Pakistan. ». Il lui avait également envoyé une lettre la félicitant et lui souhaitant un prompt rétablissement.

Voici un extrait de la lettre d'Élisabeth :

« ... Je remercie Moin Ul Haque de l'ambassade du Pakistan en France pour sa lettre de support, d'encouragement, de félicitations et de souhait d'un prompt rétablissement...

Je regrette sincèrement toutes les remarques blessantes qui ont pu être utilisées alors que je me trouvais au fond d'un abîme émotionnel, ou tous les mots étaient froids face à la tragédie. Mais je regrette encore plus tout cet empressement des médias français pendant et après le sauvetage qui parfois n'ont montré la montagne que d'un « pur point de vue sensationnel », cherchant à faire le « buzz ». Beaucoup ont parlé sans vérifier leurs sources, retenant un mot ou une expression de ma part, oubliant l'histoire que j'avais raconté. Acceptez, je vous prie, mes plus sincères excuses à vous tous."
L'ambassadeur Moin Ul Haque nous a fait savoir sa pleine satisfaction après avoir reçu les excuses d'Élisabeth Revol qui pour lui mettent fin à la polémique créée dans les médias français.

Une enquête des autorités pakistanaises a démontré qu'aucune personne d'Askari Aviation ni de l'armée pakistanaise n'a été en contact avec le routeur d'Élisabeth Revol et aucune information quelconque sur les capacités des hélicoptères de l'armée ne lui a été donné par les autorités pakistanaises impliquées dans ce sauvetage. Peut-être était-ce une source non officielle qu'il n'a pas dévoilé. Manifestement elle ne connaissait rien à l'utilisation des hélicoptères 350 B3 au Pakistan. Quoi qu'il en soit d'après ses dires, le routeur avait été informé qu'aucun hélicoptère ne pouvait récupérer à la fois Tomek et Elisabeth à l'altitude de 7 280 m où ils se trouvaient et comme il l'a déclaré lui-même à FR3 : "On lui a fortement suggéré de descendre, elle n'a pas pris la décision elle-même." Elle le confirmera en déclarant : "Ce n'est pas une décision que j'ai choisie, mais qui m'a été imposée. » Ce faisant, il aura contribué à lui sauver la vie, car elle n'était pas prête à abandonner son compagnon de cordée comme de nombreux alpinistes avant elle. Ainsi en 1956, Henry restant avec Vincendon, épuisé, 150 m sous le mont Blanc, qui perdra la vie en tentant de le sauver, Claude Jacquemard en 1966 dans une tempête à la Major qui refusa d'abandonner Bernard Mevel, lui aussi épuisé, pour ne citer que deux exemples.

Le rôle des pilotes militaires pakistanais

Pour résumer le rôle majeur des quatre pilotes de l'armée pakistanaise, le lieutenant-colonel Anjum Rafique, les majors Fakhar-e-Abbas, Jehanzeb Qazi et Hussain Hamid sans lesquels ce sauvetage n'aurait pas été possible, voici les actions qu'ils ont entreprises et qui sortent des règles militaires auxquelles ils sont soumis habituellement :

A) Le samedi 27 janvier, malgré un temps très défavorable à Skardu (vents forts, plafond nuageux bas et une très faible visibilité), les pilotes de leur propre initiative, après avoir appris qu'une fenêtre d'amélioration avait été détectée sur le Nanga Parbat, décidèrent à 12h30 de décoller. Les pilotes volèrent dans les conditions dangereuses d'un "jour blanc"

B) Bien que l'armée pakistanaise, pour des raisons de sécurité, impose aux pilotes des Écureuils un maximum de 8 heures de vol, ces pilotes ont été opérationnels dès 6 heures du matin et sont rentrés à Skardu, y atterrissant après 6 heures du soir.

C) De plus, l'armée pakistanaise impose une procédure stricte de manière à ce que les hélicoptères soient de retour à leur base de Skardu une demi-heure avant le coucher du soleil, car aucun système de vol de nuit aux instruments n'est disponible avec autant de montagnes élevées autour de Skardu. Tous les vols doivent s'effectuer de jour. Les quatre pilotes ont mis leur vie en jeu en atterrissant dans l'obscurité après le coucher du soleil.

D) La mission que leur avait confiée Askari Aviation spécifiait que les pilotes devaient déposer les sauveteurs polonais au camp de base du Nanga Parbat. Néanmoins, les pilotes ont tenu à faire mieux à la demande des sauveteurs polonais pour leur faire gagner un temps précieux. Allant au-delà de leur devoir, après plusieurs tentatives, ils ont déposé les alpinistes polonais sous le mur Kinshoffer tout près du camp I. Décision encore une fois prise à l'initiative des pilotes.
Ils méritent pleinement d'être associés à la réussite du sauvetage d'Elisabeth Revol



Dossier proposé par Eric VOLA
Mis en ligne le samedi 28 avril 2018 à 09:43:42

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